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Emprise irrégulière : des nouvelles précisions par le juge

Sommaire :

 

Le juge administratif a pu apporter d’utiles précisions en matière d’emprise irrégulière concernant l’indemnisation des préjudices découlant de la privation de la propriété. 

 

Objet :

 

CAA Marseille, 4e Ch, 19 sept. 2023, n°22MA02442, SCI Primmopro c/ EDF

 

Sources

 

a.           TC, 9 déc. 2013, n° 3931, Panizzon

b.           TC, 17 juin 2013, n°C3911, Bergoend

 

Analyse :

 

Le juge administratif a pu rappeler sa position concernant la qualification d’emprise irrégulière, c’est-à-dire celle émanant d’une décision illégale, dont le contentieux relève de ce dernier (TC, 9 déc. 2013, n° 3931), en indiquant que : 

 

« La réalisation, par une personne publique, de travaux dans le sol et le sous-sol d'une propriété privée, qui dépossède les propriétaires de la parcelle concernée d'un élément de leur droit de propriété, ne peut être régulièrement réalisée qu'après, soit l'accomplissement d'une procédure d'expropriation pour cause d'utilité publique, soit l'institution de servitudes légales, soit l'intervention d'un accord amiable avec les propriétaires de cette parcelle. Le droit à l'indemnisation des conséquences dommageables d'une emprise irrégulière d'un ouvrage public n'est pas subordonné au caractère définitif de la privation de propriété qui en résulte ».

 

L’emprise irrégulière ne peut ainsi être qualifiée qu’en cas de réalisation de travaux sur une propriété privée, que l’opération dépossède le propriétaire, et qu’il n’y a pas eu la réalisation d’une procédure régulière (expropriation, accord amiable, ou encore servitude légale). En revanche, en cas d’extinction de la propriété, ce sera la théorie de la voie de fait, issue de la jurisprudence Bergoend (TC, 17 juin 2013, n°C3911), qui aura vocation à s’appliquer. 

 

Le juge administratif ajoute ensuite quelques précisions utiles concernant les préjudices susceptibles de faire l’objet d’une indemnisation :

 

« La victime d'une emprise irrégulière ne pouvant utilement demander l'indemnisation que des préjudices qui résultent directement de cette privation de propriété […] ». 

Dans le cadre de la présente affaire, le juge rejeta la demande en réparation en raison du caractère indirecte des deux préjudices allégués par rapport à la dépossession du sol par l’installation de canalisations. 

 

La CAA de Marseille juge en effet que l’abandon d’un projet immobilier, du fait de cet emprise irrégulière, ne permet pas de caractériser un préjudice direct. Il est de même concernant la vente “à perte“ de l’immeuble.

 

Enfin, le juge ajoute une précision intéressante en indiquant que : 

 

« il résulte des termes mêmes de l'acte d'acquisition du tènement en cause, que la […] SCI Primmopro, a été précisément informée par le vendeur, de l'existence et de l'irrégularité de la canalisation de gaz […], et de l'obstacle ainsi mis, selon elle, à la bonne réalisation du projet immobilier autorisé par le permis de construire dont il était alors encore titulaire, et que la société a formellement stipulé en faire son affaire personnelle ».

 

Dès lors, le juge prendra nécessairement en compte la connaissance et l’acceptation, par la victime, de l’emprise irrégulière au sein de son acte d’acquisition du terrain, excluant ainsi la potentielle indemnisation des préjudices découlant de l’emprise : 

 

« Il suit de là que l'abandon par la SCI de son projet immobilier dont, compte tenu de son objet social et de sa qualité de professionnel de l'immobilier, elle ne pouvait pas raisonnablement ignorer les difficultés de réalisation dès l'acquisition du bien, ne peut être regardé comme dû à la présence d'ouvrages publics sur sa propriété, compte tenu de la clause dont elle a accepté l'insertion dans l'acte de vente, sans y être contrainte ou incitée à tort par un fait imputable à l'administration. Ni ce dommage, ni le dommage consécutif lié à la diminution du prix de la revente de son bien, à le supposer établi, ne sont ainsi, contrairement à ce que soutient l'appelante, liés à l'emprise irrégulière en litige ».

 

Dès lors, le juge n’exclut pas nécessairement la réparation du préjudice de l’abandon d’un projet, ou la diminution du prix de revente, mais conditionne rigoureusement la réparation des préjudices par le caractère direct.

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